6 L.A.S., Paris 1811-1832 ; 11 pages in-4 ou petit in-4, qqs en-têtes Chambre des Députés ou Dépôt légal... 5 janvier 1811, à André-Marie Ampère, pour placer dans un collège ou un lycée M. Spanière, professeur très instruit, avec envoi de son traité De l’existence de Dieu démontrée par les merveilles de la nature. Je vous demande beaucoup d’indulgence, et vous êtes trop savant et trop aimable pour me refuser ce dont j’ai un si grand besoin »… 181-, à un maître. Envoi d’un petit article, avec invitation d’y retrancher ce qui ne lui plaira pas : « C’est un jeune homme qui a fait l’article et vous savez que les jeunes gens ont beaucoup d’indulgence pour leurs amis »… 20 juillet 1824. Chef du bureau des procès-verbaux de la Chambre des Députés, il se plaint aux questeurs de deux employés non ponctuels, et propose pour les punir « une retenue de 8 ou dix jours sur leur traitement »… 24 février 1825, pour faire rendre à sa compatriote Mme Jardin son brevet de libraire…3 avril 1826, en faveur d’une gratification pour M. Rogier, « employé extraordinaire au bureau des procès-verbaux » de la Chambre des députés, à l’occasion de sa retraite… 6 janvier 1832, comme Directeur du Dépôt légal…
Manuscrit autographe signé, Propos d’un Normand, [1910] ; 2 pages in-8. Sur la contagion de la peur (texte publié dans La Dépêche de Rouen du 8 mai 1910). Il n’a pas peur lorsqu’il pense à la comète, il peut même s’amuser à imaginer des catastrophes qu’elle pourrait provoquer, mais nous ne sommes pas réellement émus par des idées : « si, par l’effet de la comète, nous nous sentions tous en même temps paralysés, ou glacés, ou chauffés, ou chatouillés, ou fatigués, ou pris de vertige, il y aurait une formidable peur sur la terre. Et cela viendrait surtout de ce que la peur se multiplierait par la contagion. Une centaine de visages hagards sous mes yeux feraient en un instant ce que les discours d’astronomes, pendant des mois, ne sauraient faire »… Ainsi il comprend la grande peur de l’an mil, et le grand mouvement de repentir et de désespoir, face non à quelque catastrophe, mais à la peur d’une catastrophe… De même, on n’a pas peur de voyager en train, mais on aurait peur de voir la peur de voyageurs qui s’enfuiraient en hurlant. « Les discours sur la comète me font rire. Mais s’ils m’étaient faits dans la rue par mille bouches sincères, je ne sais si je ne deviendrais pas aussi fou qu’eux. […] Car qu’est-ce que croire ? C’est agir et sentir comme si on croyait. Ma propre peur me convertirait en un tour de main. En revanche un moine, au milieu de nous, n’arrivera pas à croire. Voilà pourquoi il faut aimer la sagesse d’autrui autant que la sienne propre »…
L.A.S., [vers 1900], à Maurice Méry (directeur du journal humoristique Le Sourire) ; 1 page et quart in-8. « Ci-inclus un papier que, pour ma part, je trouve très bien (et je m’y connais) mais qui, peut-être (est-ce qu’on sait !) pourrait effaroucher votre pudeur, bien qu’il ne s’y trouve pas le moindre mot shocking. En ce cas, peu probable, vous n’auriez qu’à me renvoyer ledit papier illico, je le remplacerais non moins illico par un autre, mais ce serait dommage surtout pour le Sourire »... Il aimerait qu’on lui fasse suivre le courrier qui lui arrive au journal : « j’aime bien à me tenir en contact avec le public »…
L.A.S., 24 novembre 1790, à Pierre-François Palloy, « entrepreneur de bâtiments » ; 1 page in-4, adresse. Il le prie de procurer au nommé Philippe, « de l’ouvrage n’importe en quel endroit et dans quel genre »… C’est un « assez bon menuisier » :. Palloy pourra l’« employer avec confiance dans les ouvrages de cette proffession ; mais comme on fait tout quand il s’agit de vivre, il ne répugnera à rien, tant est pressant son besoin, celui de sa femme et de ses enfants »… Sous la signature d’Antoine, Palloy a noté : « architecte du Roy »
Manuscrit autographe signé, [Pour Alexandre Sojenitsyne, novembre 1969] ; 1 page et quart in-4. Contre l’exclusion de SOLJENITSYNE de l’Union des Écrivains soviétiques (4 novembre 1969). Cette déclaration au nom du Comité National des Écrivains parut dans Les Lettres françaises du 19 novembre 1969 (n° 1309). « L’exclusion de Soljénitsyne de l’Union des Écrivains Soviétiques, annoncée, puis démentie, et enfin confirmée, suivant une technique téléguidée dont nous commençons à prendre l’habitude, constitue aux yeux du monde entier une erreur monumentale, qui ne se borne pas à nuire à l’Union Soviétique, mais contribue à confirmer l’opinion du socialisme qu’en propagent ses ennemis. Nous croyons savoir qu’en d’autres temps là-bas les hommes les plus raisonnables, et ceci jusqu’aux plus hautes instances du pouvoir, ont profondément regretté l’erreur analogue commise à l’égard de Boris Pasternak. Faut-il vraiment que les grands écrivains de l’URSS soient traités comme des êtres nuisibles ? »… Et de nommer quelques écrivains victimes des Grandes Purges… « Faut-il dire à nos confrères soviétiques, à ceux qui se taisent ou qu’on force à parler comme à ceux qui attachent aujourd’hui leur nom à des actes en lesquels comment ne voient-ils pas le reflet d’un passé récent ? qu’ils devraient se rappeler que la signature de certains de leurs devanciers confirmant des exclusions semblables a été trop souvent le blanc-seing donné au bourreau ? […] nous voulons encore croire que comme au temps des colères déchaînées par un jury qui avait osé couronner le plus grand poète russe alors vivant, dans les hauts conseils de ce peuple à qui nous devons l’aurore d’Octobre et la défaite du fascisme hitlérien, il se trouvera des gens capables de comprendre le mal fait et de ne pas le laisser s’accomplir »… Et Aragon inscrit le nom des signataires de la pétition, membres du Comité directeur du CNE : Elsa Triolet, Vercors,Jacques Madaule, Arthur Adamov, Aragon, Jean-Louis Bory, Michel Butor, Jean-Pierre Faye, Georges Govy, Guillevic, Pierre Paraf, Vladimir Pozner, Alain Prévost, Christiane Rochefort, Jean Rousselot, Jean-Paul Sartre.
Manuscrit autographe signé, [Sur Louis Guilloux] ; 2 pages et demie in-4. Bel hommage à Louis Guilloux. Arland raconte leur rencontre et la naissance de leur amitié, lors de la publication en 1927 de La Maison du Peuple : « Ce fut pour moi la révélation d’un écrivain et celle d’un homme ». Il s’étonne que leurs amis communs, dont Malraux, ne les aient pas fait se rencontrer plus tôt, mais « question de nature sans doute : je vivais peu à Paris, et j’ai presque toujours évité les bavardages de salons ou de brasseries – alors que, plus accueillant et plus malicieux, Louis Guilloux y trouvait un objet d’observation »… Il se souvient d’avoir publié avec Paulhan à la NRF son livre Parpagnacco « dont Guilloux m’écrit, quand paraît le volume : “Ce livre qui vous doit tant”. Il ne me doit rien ; mais c’est un fait : nous sommes amis. […] De quoi parlons-nous ? Des amis, des voyages, des éditeurs […], du temps passé, du temps qui vient. Je me plaisais à l’écouter : il savait mieux que personne animer une scène, une rencontre, une aventure ; il semblait tout ensemble les monter et les revivre en spectacle »… Il se rappelle son étrange sourire, son humour mélancolique, « marque d’un homme qui a beaucoup vu, beaucoup vécu, beaucoup cherché, mais que rien sans doute, n’est parvenu pleinement à satisfaire », ce sourire dans lequel Arland devine « quelque nuance de la patrie bretonne, […] ce sourire présent et lointain que j’aime à retrouver dans votre œuvre »…
L.S. « Sœur Catherine Agnes de St Paul Rse Indigne », 11 mars 1665, à une sœur ; 1 page et demie in-8. Belle lettre de direction. La Mère Agnès était alors expulsée de Port-Royal et pour ainsi dire détenue au couvent des Filles de Sainte Marie au Faubourg Saint-Jacques. « Ma tres chere Sœur L’assistance que vous avez receue de Dieu dans la mort des personnes qui vous estoient infiniement cheres me fait esperer quil vous fera la mesme grace dans la perte que vous venez de faire, et que vous serez fidelle a vous despouiller du plus grand support qui vous restoit dans le monde pour en faire un sacrifice a Dieu, qui rempliera la place que vous estiez obligée de donner dans vostre coeur a cette chere defuncte C’est un si grand avantage ma chere soeur d’avoir quelque chose a donner a Dieu qu’on ne devroit pas appeller des pertes ce qui sert a luy faire des offrandes »...
P.S. par Philippe Antoine Grouvelle (1753-1806) et Guillot, « Directeurs de la fabrication des Assignats », Paris 11 septembre 1793 ; 11 pages et demie gr. in-fol. Intéressant document sur les employés à la fabrication des assignats. État des « Mandats fournis », tirés sur la Trésorerie, et remis aux ouvriers et artisans employés par l’imprimerie, en 1792-1793 : Herhan, « pour la multiplication de la taille douce », Grassal mécanicien, Pierre timbreur, Chaulin papetier, Gallois planeur en cuivre, Daumy fondeur, Tardieu graveur, ainsi que des fondeurs, graveurs, serruriers, mécaniciens, menuisiers, épingliers, plombiers, etc.
L.A.S. avec dessin, [Paris 10 avril 1938], à André Rolland de Renéville ; 1 page in-4, enveloppe. Belle lettre. « Pardonnez-moi de ne pas vous avoir remercié plus tôt pour votre livre [L’Expérience poétique]. Vous savez combien je vous admire pour cette lucide amour que vous portez à ce qui est tout, et qui n’est rien, à ce qui est nous, et notre mort – à la poésie. Lucide amour, amour exaltée et sacrifiée. Faire comprendre que l’ombre évoquée d’un nuage par les mots nombreux, cela compte, cela est sérieux, voilà la haute part que vous avez choisie – un nuage sur la face de la Puissance Assise – et vivre pour cette tâche, vivre comme on mourrait »... En marge, Audiberti a dessiné à la plume un crucifié et un personnage féminin, drapé.
Manuscrit signé avec corrections autographes du discours prononcé aux obsèques de Victor Hugo, le 1er juin 1885 ; 4 pages in-4, montées sur onglet, rel. percaline verte, pièce de titre maroquin bordeaux sur le plat sup. (rel. un peu frottée). Copie soignée, avec corrections autographes, du discours prononcé au nom de l’Académie française, devant l’Arc de Triomphe sous lequel reposait le catafalque de Victor Hugo. Augier insiste sur l’immortalité de l’œuvre poétique de son confrère : « Faut-il vous parler de l’éclat incomparable de son œuvre ? de cette imagination merveilleuse, de cette magnificence de style, de cette hauteur de pensée qui font de lui un maître sans pareil ? Ses droits à l’admiration des siècles sont proclamés plus éloquemment que je ne saurais le faire par cette cérémonie sans précédent, par cette affluence de populations accourues des quatre points cardinaux à ce pèlerinage du Génie. […] Au souverain poète, la France rend aujourd’hui les honneurs souverains. […] Ce n’est pas à des funérailles que nous assistons, c’est à un sacre »… Et de terminer par deux strophes du Retour de l’Empereur…
Manuscrit autographe signé, Lectures, [septembre 1934] ; 8 pages in-8 sur papier vert d’eau avec de nombreuses ratures et corrections. Chronique littéraire pour La Revue universelle (cachet d’imprimerie daté 18 sept. 1934), en trois parties. – Intentions. Bainville pose la question de l’impartialité des historiens : « A-t-on licence d’écrire l’histoire de la troisième République comme on écrirait celle d’une République de l’antiquité ? » Cela met en cause les capacités d’abstraction des auteurs face à l’histoire récente. De plus, on ne raconte jamais sans interpréter, sans choisir un point de vue. Le sien peut paraître un peu « naturaliste », c’est une analyse générale, le moins subjective possible : « La troisième République est entrée dans la soixante cinquième année de son âge. […] Nous avons vu sous nos yeux plusieurs régimes républicains finir plus ou moins vite par des dictatures de divers genres. En France, malgré de fortes traditions monarchiques, non seulement la République a duré […] mais encore et surtout elle a gardé les formes qu’elle avait reçues à l’origine. Elle offre la combinaison très rare de la démocratie et de la liberté […]. Deux générations ont passé et la France a toujours les mêmes institutions. […] Il ne paraît donc pas faux de dire que la Troisième République présente un cas exceptionnel de conservation »... – S’il faut prophétiser. Sur Ernest Renan, témoin privilégié et bon analyste de cette République, notamment dans ses lettres à son ami Berthelot, malgré une tendance à prophétiser ; Bainville cite aussi Anatole France, le maréchal Foch, et Joseph de Maistre… – Un ravissement, sur Le Poisson rouge de Tristan Derème : « Se jouant entre les vers et la prose, Derème a l’heureuse liberté que donne la possession des mots et du langage, et sa fantaisie touche à tout n’épuise rien, s’envole du moindre sujet »…
L.A.S., [1858], à Marie Escudier, directeur du Réveil ; 1 page in-fol. à l’encre rouge, enveloppe. Il s’est placé dans un état nerveux très étrange, hier, en voulant travailler toute la journée. « Le Napoléon III était la brochure sur l’Angleterre, mais quand j’ai été là-dedans, j’ai bien vite reconnu que la politique était inévitable : alors j’ai changé de guitare. J’ai voulu railler et j’ai commencé un article sur les Cuisiniers littéraires (Le Gourmet) mais il ne faut pas être épuisé d’électricité pour avoir du vif et du mordant. Le mordu, c’était moi ! Je me suis donc couché comme on tombe sur le champ de bataille. [...] Avec un esprit aussi mors aux dents et aussi têtu que le mien, il me faudrait, pour que l’horrible chose d’hier ne recommençât point, un article toujours fait d’avance qui serait un en cas pour les jours où je ne pourrais rimer malgré Minerve »... Mais il proteste : « plus d’articles en l’air ! J’abhorre les généralités. Si pour mon article sur ces misérables femmes, j’avais eu un livre, – que j’eusse dit mes idées à propos d’un livre, – je n’aurais pas manqué mon bond »...
Copies autographes par Guillaume-Stanislas TREBUTIEN (1800-1870) ; 10 pages et demie in-4. Intéressant ensemble de copies de lettres et de poèmes de Barbey, de la main de son fidèle ami. — « Oh ! pourquoi voyager »... : poème de 96 vers, Caen 9 décembre 1834, avec copie d’une lettre de Barbey à Trébutien le 13 décembre 1834 dans laquelle il parle de cette pièce de vers qui a reçu les applaudissements de son frère et qu’il croit « antique de pureté, d’attitude et de simplicité fière »... — Saigne mon cœur (20 vers), suivi d’un extrait d’une lettre du 29 juillet 1851, expliquant le dernier vers de cette « boucherie ». — Lettre du 13 septembre 1854 dans laquelle Barbey propose à Trebutien de collaborer à l’élaboration de deux ouvrages, l’un s’intitulerait Rhythme par Rhythme et se composerait peu à peu de ce qu’il lui enverrait, l’autre serait « des pensées sur toutes choses [...] la limaille du fer que je scie [...] les œuvres d’haleine ne seraient pas pour cela interrompues, et ce serait comme un par dessus le marché de mes autres occupations et travaux »... — A Roger de Beauvoir : envoi de 21 vers pour La Bague d’Annibal.
L.A.S., St Sauveur le Vicomte 17 janvier 1833, au président d’Avannes, et poème autographe signé, La Mauve et la petite fille ; 2 pages et demie et 4 pages in-4. — Il remercie du diplôme envoyé par l’Académie ébroïcienne, « société d’hommes spirituels, & distingués par le talent & par la science », pour le bulletin de laquelle il propose une « Chronique Normande inédite ». Il accepte d’être inscrit comme directeur de la correspondance car « la révolution de Juillet m’a fait assez de loisir pour que je puisse donner à l’étude, aux rêveries, & aux choses de la science [...] toutes les parties de ma journée qui s’écoulent ici dans une solitude de famille très favorable au travail et à la méditation »... — La Mauve et la petite fille, Harmonie marine, est une ballade de 88 vers datée de Carteret et signée « Léon d’Aurevilly rédacteur fondateur du Momus Normand » :
« Vous n’avez pas de larmes dans le cœur
Si, près de l’eau qui bouillonne & scintille »....
L.A.S., 21 juin 1854, [à Philippe BUSONI] ; 1 page in-8. Il remercie des deux volumes de sa belle traduction, qui l’ont surpris à son retour de la campagne : « je ne puis mieux répondre qu’en vous relisant avec plus d’attention et en vous priant d’accepter deux volumes de ma façon. Les vers sont un peu vieux, ils ne sont pas de Dante, cependant je ne les crois pas indignes de votre intérêt »...
L.A.S., 27 novembre [vers 1890], à Edmond Deschaumes ; 2 pages in-8. Il le remercie de son intérêt pour son dernier ouvrage : « Assurément j’aurais aimé que votre opinion ainsi motivée fut mise sous les yeux du public, car il est improbable que je reçoive de plus sûre marque de ce qui est la grande satisfaction : faire penser [...] Il est assez évident – sans y mettre une vanité qui, selon moi, n’a pas de sens – que j’écris pour des intelligences particulières plutôt que pour la masse. Je suis encore trop près de l’instant où j’ai senti tout ce qui est dans ce livre pour accepter les objections. Détaché de moi depuis quelques semaines seulement, ce bouquin-là a encore le même rythme que moi-même. Et pourtant j’entrevois déjà que dans quelque délai je serai de votre opinion. Je perdrai le parti pris si nécessaire à l’entraînement de la production »…
L.A.S., 13 novembre 1873, à M. Pingard, secrétaire de l’Institut ; 1 page in-8. Il le prie de retirer au secrétariat les billets qui lui sont réservés pour la Séance annuelle de l’Institut.
L.A.S., Mercredi [18 mai 1864], à son père Gaston Bazille ; 3 pages et demie in-8. Rare lettre, annonçant son voyage à Honfleur (avec Monet). Il commence par féliciter son père pour les récompenses obtenues par ses animaux au concours agricole de Draguignan : « Je savais déjà le beau succès de tes élèves à Draguignan, mais je ne connaissais pas le nombre de prix que tu avais remportés. Je te félicite de tout mon cœur . Je souhaite que ton bétail de Paris [lui-mêm] et Hambourg [son frère Marc] te donne autant de satisfaction ». Il donne des nouvelles de Mme Lejosne, qui a été malade… « Mon voyage à Honfleur ne me dérangera en rien, je prendrai le temps de faire deux paysages […] Je me porte toujours très bien, le climat du nord me convient parfaitement, jj’engraisse même un peu. Cependant, il me tarde bien de vous voir, je serais heureux de maigrir pendant trois ou quatre mois auprès de vous ». Il a dîné chez les Maumignard : « le cousin est décidément toqué, il a ce qu’on appelle une araignée dans le plafond. […] La cousine est toujours la même, charmante mais un peu trop opéra comique […] Il fait un temps admirable, puisse t’il durer jusqu’à ma promenade à Honfleur »…
4 L.A.S., [1867 et 1898], au compositeur Victorin de Joncières ; 10 pages in-8. De Dieppe, il attend une réponse à sa dernière lettre « avec un léger impatientement » à propos des rapports avec une certaine famille B. Il envoie deux actes de la comédie à laquelle il travaille et dont il est plutôt satisfait : « le 1er acte, exposition, me paraît bon, le 4e acte, oh le 4e acte c’est très fort, le 3e avance ». Il est question de leur opéra Sardanapale qu’il faut placer, de l’Exposition universelle à Paris où il voudrait bien se rendre, du spectacle laid et bouffon d’une procession de la Fête-Dieu à Dieppe, des articles que Joncières pourrait proposer au journal La Volonté, etc.
Manuscrit autographe, Note sur le transport électrique de la Force, [vers 1895-1900 ?] ; 3 pages in-fol. (lég. fentes marginales réparées). Intéressante étude scientifique, de premier jet, avec des passages biffés. « Supposons que dans une machine sur l’axe de laquelle est monté un frein dynamométrique convenablement chargé, on envoie des courants électriques d’intensités croissantes. Si l’intensité est trop faible, la machine ne tournera pas ; pour une certaine intensité du courant, il y aura exactement équilibre statique entre l’effort moteur dû aux actions électro-magnétiques dans la machine, et l’effort mécanique résistant exercé sur l’axe de la machine. Si l’intensité du courant primitif augmente encore, la machine se mettra à tourner, et son mouvement s’accélèrera jusqu’au moment où par le fait de son mouvement elle développera une force électromotrice inverse »… Au terme de sa démonstration, Becquerel conclut : « La solution la meilleure du problème serait de transmettre le plus de travail possible, avec le rendement le moins désavantageux ».
Manuscrit autographe signé, Sacrés Humoristes ! ; 3 pages et demie petit in-4. Saynète entre Monsieur, Madame et leur fille Alice, 18 ans. Au retour d’une visite au Salon des Humoristes, Madame indique à Monsieur son mécontentement d’avoir mené leur fille, « une vraie jeune fille, voir des gaudrioles, des petites ordures ! »… Monsieur se défend : ils ont vu des choses drôles… Mais Alice démontre, avec beaucoup de naturel, qu’elle a apprécié la grivoiserie, et Monsieur, à son tour, blâme son épouse de ne s’être pas enquise d’avance de ce que c’était que ce salon, afin de protéger leur fille : « un jour ou l’autre il t’en cuira »…
L.A.S., [à son ami Guernu] ; 4 pages in-4. Longue et intéressante analyse et critique d’une comédie satirique et politique sous la Restauration. Il lui conseille de mieux répartir l’action sur les trois actes, et d’indiquer dès le début « le but vers lequel tu fais marcher ton caractère. Cela me paraît d’autant plus convenable que les deux premiers actes me paraissent vides d’action »... Il reproche certaines plaisanteries, qui ne sont pas du meilleur goût, même si son style lui paraît fort approprié à la comédie : « Il y a des passages qui, revus un peu, paraîtront excellents », à condition de renoncer aux « plaisanteries de mots »… Il encourage l’esprit satirique et politique du sujet : « L’indépendance n’est appelée manie, que pour les usages privés. Elle est presque inconnue chez nous dans l’application à la politique, et c’est une espèce de malheur. Le titre d’indépendant donné à certains hommes est un mot sans signification. Ta pièce donnera lieu à de fréquentes applications contre les libéraux : elle pourra te conduire à des récompenses ministérielles, et tu ne peux éviter cet inconvénient. Dans un pays aussi monarchique que le nôtre, dans un pays où l’on aura tant de peine à créer une opposition forte, vigoureuse, quoique toujours mesurée, il est au moins imprudent de tourner en ridicule l’indépendance de caractère […] Après 50 ou 60 ans de gouvernement représentatif, il n’y aurait pas de mal à donner des pièces de ce genre ; aujourd’hui j’en vois beaucoup »… Etc.
L.A.S., 30 octobre [1859, à Pauline Viardot] ; 1 page et demie in-8 (cachet sec Collection Viardot). Jolie lettre à propos des Troyens [Berlioz avait confié à Pauline Viardot le manuscrit du 4e acte, afin qu’elle réalise la réduction pour piano de la Chasse royale]. « Merci, chère critique, de me renvoyer mes deux partitions. Elles sont en sortant de chez vous comme ces drapeaux qui reviennent des guerres “Plus beaux quand ils sont mutilés”. J’espère que Mr Viardot est tout à fait rétabli et que vous avez fait de votre fièvre, ce que fit de la sienne la Princesse Uranie. Si vous ne l’avez pas fait, ne tardez pas à le faire. “Noyez-la de vos propres mains. Noyez-la dans vos bains”. Mais voyez donc comme je possède mes auteurs ce matin ! »... [Berlioz a en effet successivement cité Victor Hugo (Odes, IV, 17) et Molière (Les Femmes savantes, III, 2).]
Manuscrit autographe ; 1 page et demie in-4 sur feuillet de papier quadrillé. Brouillon très raturé et corrigé d’un feuillet d’une conférence ou d’un article pendant ou juste après la guerre (1939-1945) : « C’est bien joli par exemple de prétendre que la France ne reconnaît d’autre loi que celle de son propre intérêt, mais dans un monde livré à un déterminisme impitoyable qui s’appelle la concurrence totale, la France, précisément, ne sera pas grand-chose, en attendant qu’elle ne soit plus rien »… Etc.
L.A.S., Neuilly 12 juillet 1833, au général Bertrand ; 3 pages in-4 à en-tête biffé Aide de Camp de service près du Roi (petite fente réparée). Intéressante lettre sur la fortification et la défense de Paris. Il a lu avec un vif intérêt son discours sur les fortifications de Paris, question traitée « non seulement avec la haute expérience que vous avez acquise, mais encore avec cette noble et consciencieuse conviction qui distingue votre beau caractère devenu, depuis longtemps, européen »… Il lui fait part de ses convictions personnelles : à son avis, Napoléon n’a jamais explicitement donné « un mode positif pour fortifier Paris d’une manière permanente », ce qu’il a toujours regretté : « La pensée de Vauban, notre grand maître, est plus positive ; deux enceintes concentriques et deux citadelles l’une en amont, l’autre en aval, celles-ci destinées à conserver la position après la prise des enceintes, et à recevoir tout le matériel d’une aussi grande défense. C’est une idée générale à laquelle je me suis attaché ; […] je crois qu’une ceinture de forts occupant les postions autour de Paris, le mur d’octroi convenablement organisé et protégé en avant par les faubourgs barricadés forment deux lignes concentriques de défense […] analogues à celles de Vauban. Je crois ce système moins coûteux que celui d’une seule enceinte bastionnée »… La situation politique de l’Europe ne permettant pas de s’abandonner à l’idée flatteuse d’une longue paix, il pense que Paris devrait être fortifiée, et au plus vite… De plus, il est persuadé que Paris ne peut être défendu par une simple garnison : « dans le cas d’une invasion, l’armée défensive ne peut manœuvrer que dans le sens d’une concentration sur Paris : point d’une importance immense »….
L.A.S., [octobre 1903], à Édouard De Max ; 7 pages in-8 à ses chiffre, emblème et devise Quand même. Belle lettre de la directrice de théâtre au comédien, concernant la pièce d’Albert Keim, Le Dieu vert (créée au Théâtre Sarah Bernhardt le 5 novembre 1903, avec De Max et Marguerite Moreno dans les principaux rôles). « Mon cher petit De Max, Ullmann me dit que vous n’êtes pas très satisfait de la distribution du Dieu vert. Je ne demande pas mieux que d’engager pour cette pièce un ou deux artistes qui vous seront agréables ; mais je ne suis pas assez riche pour risquer des cachets supplémentaires en ce moment. Ne croyez-vous pas que nous ferions mieux de jouer Pardonnez-nous... d’abord seul avec un lever de rideau et de lancer après Le Dieu Vert au bout de 15 représentations. Nous pourrions donner tous nos soirs au Dieu Vert avec calme et en toute quiétude car je crois que Pardonnez-nous... sera un succès. Je sais mes trois actes comme une pie, et je répète chaque jour avec Desjardins. La mise en scène est parfaite je vous en fais mes compliments »... Elle propose de « commencer le spectacle par le Rosier blanc une pièce en vers déjà répétée et sue. […] Je serai à Paris le 31 au soir je répéterai le Samedi 31 le Dimanche dans la journée et je ferai relâche le Lundi et mardi répétant matin et soir pour passer le mercredi 4 la répétition générale. Il faut que je fasse un effort surhumain pour arriver mais il le faut »…