Catalogue 2023

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  • 017 Thomas-Arthur de LALLY-TOLENDAL (1702-1766) gouverneur des Indes, vaincu par les Anglais ; accusé de trahison, il fut décapité

  • 017 Thomas-Arthur de LALLY-TOLENDAL (1702-1766) gouverneur des Indes, vaincu par les Anglais ; accusé de trahison, il fut décapité Image
  • Manuscrit autographe, Tableau historique de l’expédition de l’Inde, [1766] ; cahier de 27 pages in-fol., lié d’un ruban vert.

    Mémoire pour sa défense, exposant les difficultés auxquelles il dut faire face et la mauvaise volonté et les défaillances de ses collaborateurs, notamment du comte d’Aché, commandant l’escadre de la mission, du lieutenant-colonel Bussy, qui tenait le Deccan, et du conseiller Moracin, qui commandait la garnison française de Masulipatam. Le manuscrit présente de nombreuses ratures, corrections et additions ; la fin en a été fortement remaniée. Après remaniement et développement, cette relation fut publiée en 1766 sous le titre Tableau historique de l’expédition de l’Inde pour le comte de Lally, contre M. le Procureur Général (Paris, impr. de Simon).

    Nommé au mois d’août 1756 pour commander l’expédition de l’Inde, Lally a connu aussitôt des obstacles : un départ retardé, une réduction sévère des forces prévues, et une traversée inhabituellement longue (12 mois), ayant pour conséquence que les amiraux britanniques purent joindre leurs forces et arriver à la côte de l’Inde avant les Français… L’avantage qu’eut le chevalier de Soupire de débarquer à Pondichéry des mois avant tout le monde fut perdu car le sieur de Leyrit [le gouverneur] « l’a tenu pendant ces 8 mois dans l’inaction et a consommé sans fruit l’argent qu’il avoit apporté d’Europe »… Dès son arrivée, Lally livra combat et perdit un vaisseau de 74 pièces de canons. Il assiégea Saint-David avec succès, puis prit Divicottey, mais le comte d’Aché s’était éloigné à 60 lieues de crainte de l’escadre anglaise et refusa de protéger la marche de Lally vers Madras… Là-dessus Leyrit annonça qu’au-delà de 15 jours, il ne paierait ni ne nourrirait l’armée, mais que Lally obtiendrait des fonds en intimidant le Raja de Tanjaour, qui avait une vieille dette à la Compagnie des Indes… Au cours de cette opération infructueuse, Lally fut victime d’une tentative d’assassinat par un général de cavalerie noir parvenu jusque sous sa tente par ruse : l’aventure se solda par la mort de l’assassin et de ses 50 cavaliers… Ayant appris que Pondichéry était menacé, Lally y retourna pour découvrir que le comte d’Aché abandonnait la côte pour se mettre à l’abri à l’Île de France [Maurice], et que Bussy et Moracin refusaient de collaborer à une expédition à Madras, voire d’obéir aux ordres… Lally multiplie les précisions sur les combinaisons échafaudées pour solder l’armée… Il occupa rapidement Madras (13 décembre 1758), mais pendant ce temps, l’escadre de M. de Léguille, qui amenait à Pondichéry 4 vaisseaux du Roi et 3 millions, fut retenue par d’Aché à l’Île de France, alors qu’elle eût été maître de toute la côte de Coromandel, eût empêché la compagnie anglaise de débarquer 600 hommes à Madras, et eût permis de reprendre ce qu’on avait perdu dans le Bengale... « Quelle autre cause cherche t’on donc de la perte de Pond[ichéry] et de toute l’Inde »… Les malheurs s’accumulent : Lally manque de succomber à une « fièvre chaude », une partie de l’armée se révolte, le comte d’Aché reparaît après 13 mois d’absence pour annoncer qu’il part le lendemain pour les îles, et une protestation du Conseil ne réussit qu’à ramener cet amiral à Pondichéry pour quatre jours avant sa disparition définitive, et cela malgré la nouvelle que l’armée venait de gagner une bataille, « evenement qui eut decidé tous les princes du pays en notre faveur sans cet abandon subit de l’escadre »… Il commente avec amertume : « Si toutes ces manœuvres, si toutes les horreurs qui les ont suivies […], si l’attentat à la vie du cte de Lally et à celle de l’intendant de son armée qui les a couronné, paroissent des evenements simples et dus au hasard seul, il est inutil que le cte de Lally ouvre la bouche pour sa deffense »… Et de donner de nouvelles preuves de la perfidie de Leyrit, et de la mauvaise volonté du Conseil à appuyer ses négociations pour approvisionner Pondichéry, et des explications sur « ces fameuses campagnes herisséz de victoires que les srs Bussy et Moracin faisoyent retentir dans les gazettes d’Europe », et qui n’étaient autre chose que la mise à contribution des princes du pays… Enfin, la ville de Pondichéry s’est rendue le 16 janvier 1761, le fort intérieur le 17, et après avoir esquivé de nouvelles tentatives d’assassinat, Lally, malade, fut ramené en Europe dans des conditions indignes, pour passer 15 mois en détention sur la foi d’un libelle, avant d’apprendre qu’il serait jugé pour « des depradations et concussions commises dans l’Inde, comme ayant eté cause de la perte de Pondichery »… Le rapporteur n’ayant rien trouvé qui soutînt cette accusation, on obtint de nouvelles lettres patentes du Roi pour diriger une instruction pour haute trahison. « Mais les temoins qui ont deposé contre le cte de Lally n’ont pas meme osé hasarder le mot d’intelligence entre luy et l’ennemy […], les temoins militaires les plus acharnéz contre luy ont deposé formellement qu’ils ne pretendoyent pas inferer cette pretendue intelligence de sa conduite militaire, quoy que blamable d’ailleurs, et en effet il paroît assez dificile de supposer cette intelligence dans un homme qui a porté tout son bien dans l’Inde, et qui l’a sacrifié pour le soutien de Pond. ; dans un homme qui a laissé au tresor de Pond. 400 mil livres de ses appointements pendant tout son sejour dans l’Inde, pour la deffendre contre ce meme ennemi ; dans un homme enfin qui eut fait une fortune eclatante si il eut pu reussir contre ce meme ennemy, et qui ne s’est attiré la haine de ses accusateurs que parce qu’il exigeoit d’eux de l’aider a se deffendre contre ce meme ennemy »… Il rappelle en outre que l’on n’a jamais inquiété les officiers et employés de l’Inde qui se sont attroupés pour l’insulter, et pour tuer l’intendant de l’armée… Et de livrer les conclusions que l’on devrait tirer de sa conduite : « pendant que le sr de Leiryt a payé son armée, il s’est emparé malgré la deffaite de Mr d’Aché et la superiorité de l’ennemy sur mer de toutes les places maritimes que cet ennemy possedoit dans le sud de Pondichery […]. Qu’avec 2700 hommes il a osé assieger, et n’a pu prendre Madras, place forte qui avoit 5 mil hommes pour sa deffense, et qui en outre avoit la mer libre. Que l’armée que l’ennemy avoit en campagne a tenté 4 fois de luy faire lever le siege, et que 4 fois il l’a repoussé et l’a dissipé entierement. Que malgré le mecontentement d’une armée menaçant a chaque instant de passer a l’ennemy et qui s’est revoltée deux fois sur ce qu’elle n’etoit pas payé, le cte de Lally s’est emparé d’un fort jugé imprenable que l’ennemy occupoit dans l’interieur du pays, et que deux mois apres il a battu ce meme ennemy qui est venu l’attaquer sous Vandavachy. […] Que reduit a 700 hommes de troupes regléez contre 15 mil hommes de troupes de terre et 14 vaissaux il a eté contraint de se rendre à l’ennemy apres un blocus et un investissement de 9 mois, et qu’il ne s’est rendu que quand il ne luy a pas resté un grain de ris ou aucune autre espece de nourriture pour sa garnison déjà extenuée »…

    On joint la copie mise au net, avec une longue addition autographe à l’avant-dernière page (cahier de 28 pages in-fol., lié d’un ruban bleu).

     

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