Catalogue 2020

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  • 034 Léon BLOY (1846-1917) écrivain

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  • manuscrit autographe, Introduction. De l’Enthousiasme en littérature, décembre 1877 ; 5 pages et demie in-fol. écrites au recto, paginées au crayon bleu, rel. demi-maroquin noir à coins (Semet & Plumelle, ex-libris WF).

    Éloge plein de verve et d’amertume de l’enthousiasme, paru le 22 février 1879 dans Le Foyer illustrée, et repris dans Le Chat noir des 16 et 23 février 1884 sous le titre L’Enthousiasme en art, sonate romantique. D’importants éléments en furent modifiés et repris pour la préface des Propos d’un entrepreneur de démolitions (Tresse, 1884) sous le titre « L’Enthousiasme en art. Sonate romantique pour servir de préface ». Bloy, las de la « décrépitude moderne » et de la médiocrité d’une société égalitaire, regrette que la Gloire soit délaissée pour cet « infâme drôlesse » qu’est le Succès. Il crie rageusement sa nostalgie de cet élan d’émotion qui participe du mouvement et de la vie : « L’enthousiasme est un Dieu dans le cœur et quand le cœur en est rempli, il est irrésistiblement porté en haut de la vie et en haut du monde, infiniment au-dessus de tout ce qu’il aime, de tout ce qu’il voit et de tout ce qu’il juge, dans l’empyrée de son propre rêve intérieurement réalisé. C’est le mouvement sublime par lequel les sentiments enveloppés et sommeillant dans l’âme humaine éclatent soudainement dans la vie morale et retentissent dans tous les actes extérieurs de la vie physique. L’enthousiasme est une lampe ardente placée physiologiquement et psychologiquement au-dessous de la pensée comme au-dessous d’un vase plein d’un liquide glacé et qui l’échauffe, le purifie, le subtilise et quelquefois même le colore, sans jamais parvenir à le consumer. L’enthousiasme, enfin, est une rage de vie supérieure et un divin mécontentement des conditions inflexibles de la vie normale. Aimer n’est rien, le plus plat bourgeois en est capable, mais aimer avec enthousiasme, un héros seul le peut faire et c’est encore ce qu’on a pu trouver de plus beau sur cette sphère raboteuse où, depuis six mille ans, pâture le genre humain ! »... Bloy s’insurge contre la littérature moderne, vénale, stérile et pathologique. Nos « pères bourgeois de 1830 » braillaient des bêtises, mais ils avaient de l’enthousiasme, alors que ses chers amis les jeunes gens veulent « demeurer modernes par la pensée et par les mœurs, c’est-à-dire en dehors de toutes les conditions intellectuelles et psychologiques sans lesquelles nulle beauté dans l’invention n’est humainement, expérimentalement possible. Ils veulent être sans Dieu et ne pas souffrir ! »... Et de railler ces « sinistres idiots » qui traînent dans le ruisseau de la Libre Pensée : « Et vous parlez de jouir ! Et vous n’avez pas même le triste génie de jouir avec l’intense profondeur des voluptueux du paganisme dont vous n’avez sucé que les vieilles phrases sans en retenir le diabolisme essentiel, par cette belle raison qu’il ne se combinait pas avec l’éducation plus ou moins chrétienne qu’on vous avait donnée. Et cette raison vous déshonore puisqu’elle rend évidents le mensonge de votre athéisme et le charlatanisme pervers de votre enfantillage éternel. [...] Quant à la littérature, vous verrez si c’est une chose facile quand on n’a pas souffert et qu’on ne veut pas souffrir. On ne change pas la nature des choses et on ne décrète pas que les poëtes heureux seront sublimes »...

  • 2 800 

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