Catalogue 2023

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  • 107 Gaston CHAISSAC (1910-1964) peintre

  • 107 Gaston CHAISSAC (1910-1964) peintre Image
  • 2 L.A.S., dont une avec collage, [4 juillet 1957 et s.d.], à Jean Paulhan ; 2 pages in-4 (26,5 x 20,8 cm), et 1 page petit in-4 (22 x 16,5 cm).

    Amusante lettre avec collage original.

    Ces deux lettres étaient destinées à être publiées dans la Nouvelle Revue française sous forme de chronique (la revue publiait régulièrement des lettres de Chaissac sous le titre Chronique de l’Oie), comme le montrent quelques mots biffés au crayon bleu, dont le nom du destinataire, ainsi que leur transcription dactylographiée (jointe) sous le titre Lettre des champs, titre sous lequel la première lettre a été publiée (avec quelques suppressions et modifications) dans le n°64 d’avril 1958 de la revue (reprise dans l’édition des Lettres à Jean Paulhan, n° 119) ; la seconde lettre est restée inédite.

    « Le pape actuel a vu le soleil danser mais il n’est pas un self-made man. Qu’importe à un self-made man de ne pas avoir vu le soleil faire la danse du ventre mais la jument Polka, du fermier Baron, ou une autre faire travailler ses mâchoires à sa mangeoire. Mais ne verriez-vous pas un chic mécène, partisant des chemins impraticables qui consentirait à me bâtir un home surprenant sur celui qui vat de la Guérinière, de l’Oie, à Mouchamps, via Lérablet ? […] Le chemin en question fait péniblement réunir deux petites routes dont l’une dessert le château d’un vieux pharmacien retiré des affaires. C’est un endroit désert et quelque peu marécageux, mais je lui trouve du sel. Ce n’est pas là que les clients viendraient me trouver mais comme je n’en ai pas. Ce serait assez cocasse de voir surgir là une maison comme la vôtre de Paris face aux arènes de Lutèce ». Il est « en petit travaux de peinture. Impossible de voir grand dans la purée même mousseline. Mais d’habiter un chemin vraiment impossible pourrait contribuer à faire amplifier ma légende »… Il y souhaiterait « la reconstitution d’une loge de concierge » avec « une chambre de bonne haut perchée. Mais pas la peine de reconstituer l’immeuble en entier, je me contenterai d’une cabine en haut d’une construction asperge genre poste d’observation. Puis il parle de ses collages (le 2e page est écrite par-dessus un collage fait de billets de banque déchirés) : « Comme “œuvres” récentes, j’ai fait 1 collages avec comme font un papier d’emballage des graines villemorin qui était dans un état aussi lamentable que ces restes de billets et j’ai dû en camoufler les multiples évantrations. Et bien malgré son froissage et reste de décrépitude voyante et incurable, le résultat est assez satisfaisant. J’ai aussi imaginé de faire des collages artistiques au dos de mes tableaux peints sur papier pour les consolider. Hier 3.7.57, vers dix-neufs heures, j’ai fait ma vaisselle de deux jours ». Jakowski veut venir le voir en vue de « publier un livre dans lequel de mes lettres figureraient. Avec notice explicative sans doute en certificat d’origine. Mais j’aimerais autant sans commentaires ». Il évoque pour finir Queneau et Prévert, « qui tournent un tantinet à l’enfant de chœur avec sa ballade sur le mont chauve. Peut-être parce que le soleil qui danse c’est laissé voir au pape dans un pas de polka sans doute. Devant le vicaire du maître du monde il ne pouvait se laisser aller à une danse lascive, des fois que ça lui aurait fait perdre sa situation ».

    Dans la seconde lettre, Chaissac évoque sa « chambre de jeune homme dans la Nièvre », ornée de « bondieuseries » et d’une « reproduction de la leçon de clavecin, de Muenier, et lorsque j’ai vu le père Mangaud, président des indépendants de l’Ouest, j’ai cru avoir devant moi le vieux professeur de musique de cette peinture ». La femme de Mangaud, qui vient de mourir , « avait joué des petits rôles dans un casino de la banlieue de Bordeaux »  ; et les Mangaud ont une villa aux Sables d’Olonne qui « louée en mageure partie aux estivants augmenta leurs rentes. Ce n’est pas en jouant son petit bonhomme de rôle en chemin creux désert ou les metteurs en scènes ne mettent jamais les pieds qu’on parvient à bâtir mais tout au plus à se faire mettre en boîte »…

  • 3 000

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